LA NOUVELLE REVUE PRESSE-CITRON DE JEAN-PAUL POURON

D’humeur cafetière (pas cafeteuse)

Le rythme rapide des changements de moeurs dans la vie suédoise entraîne parfois des situations auxquels les Suédois, pourtant pragmatiques, ont du mal à faire face. Ainsi les nouvelles habitudes des nouvelles mamans qui se retrouvent dans les nombreux cafés qui se sont ouverts ces dernières années à Stockholm. Auparavant, elles s’embêtaient seules à la maison, désormais, elles partagent leur congé maternel avec leurs copines, leurs enfants et les enfants des copines… dans les cafés (je ne sais pas si ça vaut pour les hommes, qui eux aussi assument leur congé paternel : deux mois obligatoires sur les quinze mois du congé parental, sinon, pas d’allocations.

Le législateur voudrait le faire passer à quatre mois pour les papas !). Bref, ces nouvelles coutumes ne sont pas du goût de tous. Récemment, un cafetier avait affiché sur sa porte que les enfants n’étaient pas les bienvenus dans son établissement. Dénonciation immédiate d’un groupe de femmes à l’ombudsman à la discrimination qui l’a tancé de rouvrir son café à tous. Surprenant que le médiateur n’ait pas d’autres problèmes plus urgents à traiter ? Débats ensuite dans tout le royaume sur le thème : a-t-on le droit d’interdire les cafés aux enfants ? Bonne question.

Il faut se souvenir que l’enfant est roi en Suède, qu’il fait pratiquement ce que bon lui semble et qu’il est urgent pour les parents comme ceux qui les entourent de ne surtout pas intervenir, cela pouvant les traumatiser. Ainsi, les enfants braillent, se roulent, font leur souk sans que quiconque ait en principe à y redire. Ça, c’est pour la théorie.

En réalité, nos chères têtes blondes livrées à elles-mêmes en irritent plus d’un, mais comme le Suédois lambda ne tient pas à perdre la face, il se défausse autrement, par voie de presse ou dans les media sociaux. Résultat, des voix célèbres et pas des plus tendres se sont fait entendre sur la question d’où il ressort bizarrement que la plupart des consommateurs dans les cafés veulent qu’on leur foute la paix et que les mômes, même si c’est l’avenir du royaume et tout et tout, il faut, à un moment savoir leur dire : basta ! (dans le texte)

De guerre lasse, le cafetier a finalement rouvert son établissement, mais le débat continue. Le conformisme a encore de l’avenir.

D’humeur prophétique

Les conseillers municipaux de la commune de Fittja dans la banlieue sud de Stockholm, ont récemment décidé d’autoriser l’appel à la prière depuis le minaret de la mosquée. Une loi de 1994 interdisait cette coutume musulmane. Après son abrogation, le conseil municipal (sauf les chrétiens démocrates, KD) s’est prononcé en faveur de l’adhan et ainsi fin mars le muezzin pourra faire entendre via les hauts parleurs le fameux : allāhu ākbar.

À signaler que la mosquée de Fittja est la seule à posséder un minaret. Une petite révolution tout de même ! Il va s’en dire que la décision des conseillers est loin de faire l’unanimité à Stockholm et ses alentours. Même dans les banlieues à forte concentration d’immigrés, ça grince et tous les arguments clichés y passent. « Les cloches des églises sonnent bien, elles. », « Les Musulmans doivent s’adapter au pays qui les accueillent et non l’inverse. », « Dans leur pays, un temple protestant ne serait pas autorisé. », « Ça commence avec une mosquée, et ça s’arrête où ? », « On a rien contre l’islam, mais la Suède est pays de confession luthérienne. », etc.

Les Suédois sont très ouverts et libéraux sur ces questions qui touchent au culte : tchador, burqa, niqab, hidjab et autres voiles ne sont pas interdits, pas plus que les autres symboles d’autres religions. N’empêche, les démocrates suédois (SD), cette formation d’extrême droite suédoise anti-immigration, gagnent dans les sondages (crédités de plus de 10 % à un an et demi des élections générales. Ils n’étaient pas représentés au Parlement il y a deux ans !).

Nul n’est prophète en son pays !

D’humeur confirmée

La confirmation dans l’Église de Suède n’est décidemment plus ce qu’elle était. Le rite de passage est devenu nettement plus hard ! Ainsi, une jeune fille du diocèse de Rödeby dans le sud de la Suède s’est vue accordée au terme de sa retraite un diplôme d’aptitude à baiser (knullborgarmärke) qui veut bien dire ce qu’il veut dire, mais qui en réalité n’existe plus depuis 2007 (ça veut dire qu’avant… !) !

La période catéchétique a dû être chaude ? L’imposition des mains a-t-elle été baladeuse ? Le goupillon trop inquisiteur ? Pas du tout, un instructeur laïc s’était fait passer pour un membre de l’Association suédoise pour l’éducation sexuelle, RFSU et avait animé à ce titre une table ronde sur l’amour et la sexualité. Cunnilingus et fellation étaient au programme. Pas nécessairement du goût de l’église qui a décidé de porter plainte.

Il faut dire que ces histoires de sexualité ne font en général pas florès en Suède. L’éducation sexuelle commence très tôt à l’école, mais dans le même temps la loi n’autorise pas les relations sexuelles avant l’âge de 15 ans, quant à l’Église de Suède, elle n’est pas particulièrement progressiste en la matière. Une espèce de maelström des comportements où il est difficile de s’y retrouver mais qui ne pose, en réalité, pas problème chez le Suédois lambda. Ne pas confondre l’acte d’envoi des confirmands avec le passage à l’acte !

D’humeur déridée

Pas beau de mentir ! L’Oréal, pas besoin de présenter, s’est fait épingler par la justice suédoise pour publicité mensongère. Les crèmes anti-rides de la firme qui le vaut bien n’ont d’anti-rides que le nom, rien n’est scientifiquement prouvé, bref, c’est du pipeau ! Si elles étaient réellement efficaces, la patronne, Liliane Bettencourt, en saurait quelque chose !

Si l’Oréal ne retire pas ses allégations litigieuses des publicités dans les magazines suédois, elle sera condamnée à verser 120 000 euros (une bagatelle ; CA 2012 : 22, 46 milliards d’euros !). Déjà condamné en 2010 pour le même motif, le fabricant de cosmétiques ne semble pas craindre outre mesure la justice suédoise.Mais que fait la peau lisse !