Nobel et anti-Nobel !

Après une escapade de trois jours en France, les souverains suédois sont donc rentrés chez eux. La reine avec sa gastro-entérite aigüe, le roi face à une situation politique compliquée -un gouvernement démissionnaire et de nouvelles élections fixées au 22 mars 2015– bien que le monarque n’ait pas grand-chose à voir avec les événements et la campagne qui s’annonce (le roi n’a aucun pouvoir politique en Suède).

SUE_NobelPar contre il arrive à temps pour honorer, comme d’habitude, la semaine la plus importante du petit royaume. La semaine qui replace chaque année la Suède au centre du monde. La semaine Nobel. Le 10 décembre, l’Académie royale suédoise remettra les Prix Nobel 2015 et les différents lauréats recevront leur plaquette et leur chèque de 870.000€ des mains du roi. (Le Nobel de la Paix est remis le même jour à Oslo en Norvège).

Mais que représentent aujourd’hui les prix Nobel, plus d’un siècle après la mort d’Alfred Nobel qui dans son testament  stipulait qu’il voulait « distinguer une personne ou une organisation qui DURANT L’ANNEE ECOULEE aura rendu le plus grand service à l’humanité » ?
Alors le prix Nobel de Littérature à Patrick Modiano ? OK, c’est sympa, mais la vie des quartiers de Paris sous l’occupation…au service de l’humanité en 2014 ??
Le prix Nobel d’économie à Jean Tirole, bien ! Mais on ne peut s’empêcher de voir la distinction d’un économiste de la croissance, français de surcroit, comme un clin d’œil ou un pied de nez à la crise économique et financière que connait la planète..!
Des Nobel de médecine, physique, chimie décernés comme un passage obligé notamment aux USA… mais rien de nouveau au pays du père Nobel !

Si, et il faut lire l’excellent article de notre consoeur Anne Françoise Hivert, la correspondante de Libération en Scandinavie passé un peu trop inaperçu le 27 novembre.
Quelques jours avant la grande messe des Nobel, la Fondation Right Livelihood Award s’invite chaque année au Parlement suédois pour récompenser ses propres lauréats. Des prix dits Nobel alternatifs ou  Prix anti-Nobel.

Right Livelihood Award 2014
Cette année, les lauréats ont été Alan Rusbridger, le rédacteur en chef du quotidien britannique The Gardian, l’avocate pakistanaise Asma Jahangir, le militants des droits de l’homme sri-lankais Basil Fernando, l’environnementaliste américain Bill Mc Kibben et Edward Snowden (représenté ici par son père au centre de l’image) à l’origine des révélations sur le programme de surveillance des Etats-Unis. Tous « ont fait preuve d’un courage moral et d’un engagement en faveur du changement social » selon les libellés du jury.
Ont été distingués depuis plus de 30 ans, 158 lauréats originaires de 65 pays, parmi lesquels Raji Sourani, Directeur du Centre des Droits de l’Homme de Gaza en 2013, la Kényane Wangari Maathai en 1984 (nobelisée 20 ans plus tard) et le couple franco-suédois Marie-Thérèse et Bengt Danielsson en 1991 « pour leur engagement contre le colonialisme nucléaire de la France en Polynésie »…
Il faut lire le Grand Angle de Libération où AFH nous raconte l’histoire de la Fondation et de ses enjeux humains et environnementaux (elle sauve des vies et cherche à sauver la planète) de son fondateur (Jakob von Uexküll, fils d’un journaliste allemand émigré en Suède pendant la seconde guerre mondiale), du jury qui agit comme « un détecteur sismique qui permet d’identifier les problèmes actuels les plus urgents » et des prix que la Fondation attribue depuis 1980 « Le Nobel était le prix du siècle dernier, tandis que le RLA est celui du nouveau millénaire » aurait dit une députée suédoise. Des propos que les anti-Nobel ne renient pas ! http://youtu.be/YJPEswta214