Vendée Globe (2/2) : Le Finistère aux commandes !

Armel Le Cléac’h bien sûr le grand vainqueur mais aussi la voile bretonne, le Pôle « Finistère course au large », Ino-Rope et Ariane Pehrson..!

Après 74 jours, 3 heures, 35 minutes et 46 secondes de course, Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII) a franchi en tête la ligne d’arrivée de la 8ème édition du Vendée Globe, jeudi dernier. Il pulvérise de quatre jours le record de l’épreuve de François Gabart, vainqueur il y a 4 ans.

A 39 ans, le Breton de Saint-Paul de Léon (Finistère Nord) a su tirer avantage d’une course au contact pour remporter cette course. En tête depuis 46 jours, impressionnant de maîtrise, tant sur le plan technique que mental, il se débarrasse de cette image d’éternel second qui lui collait à la peau depuis ses deux deuxièmes places dans les éditions précédentes (2008/2009 et 20012/2013).

Ken Read sur la Volvo Ocean Race

« Moi qui ai fait deux tours du monde en équipage, je peux vous dire que je n’oserai pas suivre ces fous furieux de français, rigole Ken Read, le grand skipper américain, aujourd’hui PDG de North Sails dont la filiale France à Vannes a conçu toute la voilerie du vainqueur. Sincèrement je ne sais pas comment ils tiennent le coup. » Fasciné par ces difficultés et l’engouement du public français, le marin businessman pense que le Vendée Globe est une course qui mériterait un plus grand retentissement international. «C’est l’épreuve absolue, l’aventure la plus extrême, mais elle est loin d’être aussi bien couverte que la suédoise Volvo Ocean Race par exemple » déplore-t-il.

La voile bretonne en pole position !

North Sails, Incidence Sails et All Purpose… Elles sont trois sociétés bretonnes à avoir conçu les voiles des skippers de cette 8ème édition du Vendée Globe.
L’américain North Sails conçoit ses voiles à Vannes. Armel Le Cléach’, Jean Le Cam et Vincent Riou se sont élancés avec près de 1600 m2 de toile conçue par la PME. Découpées sur mesure et assemblées dans l’atelier vannetais par une trentaine de personnes, elles sont toutefois fabriquées au Nevada.
Six des vingt-neuf coureurs de ce 8e Vendée Globe étaient équipés de voiles Incidence Sails. Parmi eux, de jeunes skippers prometteurs, Paul Meilhat (SMA) et Morgan Lagravière (Safran) ; des fidèles, Arnaud Boissière (La Mie Câline) et Bertrand de Broc (MACSF) et des nouveaux venus, Éric Bellion (Comme un Seul Homme) et Rich Wilson (Great American IV), ces 2 derniers toujours en course. Incidence basée à Brest fabrique des voiles sur mesure dans ses locaux. 110-120 salariés s’affairent pour confectionner chaque semaine entre 20 et 30 voiles.
Le 3ème fabricant All Purpose installé à la Trinité-sur-mer, lui aussi conçoit ses voiles et emploie 11 salariés. A elles seules, ces trois PME fournissaient la quasi-totalité des coureurs de cette édition 2016/2017 du Vendée Globe.

Au Pôle Finistère Course au Large en octobre dernier. De G à D: Eliès, Meilhat, Le Cléac’h, Riou

Le Pôle « Finistère course au large » peut se féliciter d’avoir dans le Top 6 du Vendée Globe challenge, 4 skippers dont le vainqueur, qui ont suivi la formation au sein de cet établissement pas comme les autres.
Créé en 1990 sous l’impulsion de grands champions tels que Michel Desjoyeaux, Jean Le Cam, Roland Jourdain, ou encore Bertrand de Broc, convaincus de l’intérêt de se regrouper afin de mutualiser leur préparation sportive, le Pôle Finistère Course au large basé à Port-La-Forêt près de Concarneau (Finistère Sud) est devenu la référence absolue en Europe en matière de préparation des navigateurs de haut niveau.
Il peut accueillir une vingtaine de sportifs en formation initiale et il apporte également sa contribution sportive à la préparation des navigateurs à la Route du Rhum ou au Vendée Globe.
Le palmarès des skippers passés par cette préparation exigeante est éloquent. Rares sont les Vendée Globe qui ont échappé au Pôle. Multiples victoires dans les Transats , Trophée Jules Verne, Route du Rhum, Solitaire du Figaro….
Nous avions vu les skippers en stage à moins de 3 semaines du départ et avions parlé avec le vétéran Riou (vainqueur en 2004/2005) et le jeune Paul Meilhat dont c’était le premier Vendée, avec Yann Eliès (toujours en course) et Armel Le Cléac’h …. et ils nous avaient assuré en choeur que nous avions devant nous le prochain vainqueur ! C’est fait.

Des poulies innovantes pour les skippers !

La petite poulie révolutionnaire Ino-Block à axe textile et les cordages fabriqués par Ino-Rope à l’atelier de Concarneau ont équipés un tiers de la flotte du Vendée Globe et notamment le bateau de Le Cléac’h.
C’est à Concarneau que les huit salariés de la jeune société Ino-Rope étaient sur le pont cet automne dans leur atelier installé chez Kaïros, la « pépinière d’entreprises innovantes » de Roland Jourdain, le navigateur. Objectif ? Le Challenge Vendée Globe. Et le 6 novembre dernier, pas moins de neuf bateaux de la classe Imoca (monocoque de 60 pieds), soit près d’un tiers de la flotte, s’étaient élancés des Sables-d’Olonne avec leurs poulies innovantes et leurs cordages taillés, entre autres, dans le Dyneema®, une fibre synthétique ultra-résistante.
Pourtant, l’affaire était loin d’être gagnée. Exceptés Banque Populaire et son skipper Armel Le Cléac’h « partenaire historique d’Ino-Rope », les coureurs du grand large, un peu frileux, ont mis du temps à se laisser séduire par la petite Ino-Block aujourd’hui déclinée en huit modèles pouvant bouger des charges de 800 kg à six tonnes.
L’histoire ? En 2013, Julien Barnet et Thibault Reinhart créent leur petite entreprise autour d’une idée lumineuse : une poulie « unique au monde » qui bouscule les idées reçues. Exit l’acier ou l’inox, l’axe sera en textile Dyneema®. « Son concept, sa force, c’est son rapport poids/résistance qui fait d’elle la meilleure du marché mondial, explique Thibault Reinhart. Sa qualité, c’est d’être très fiable, légère et surtout, immergée elle ne rouille pas. Aujourd’hui, nous sommes les seuls à pouvoir la commercialiser dans le monde avec un brevet béton. »
Les premières poulies sont commercialisées en 2015. Mais alors que la filière nautique est le premier marché ciblé, les clients manquent à l’appel. L’innovation fait peur. Armel Le Cleac’h est le premier à oser. Il n’a pas eu à le regretter « Depuis le lancement il y a deux ans, aucune poulie n’a cassé. Quand les autres navigateurs ont vu que Banque populaire avait gardé ses poulies après une saison, ils se sont engagés, poursuit le patron associé.
Pour le Vendée Globe 2016, deux bateaux, La Fabrique du Suisse Alan Roura, et Techno First-Face Océan de Sébastien Destremeau, en étaient entièrement équipés (bateaux toujours en course!). » Mais pas que!
Experte également en matelotage (le travail des cordages), Ino-Rope assurait le gréement complet de quatre bateaux participants au Vendée Globe (Souffle du Nord, Spirit of Yukoh, La Fabrique et Techno First-FaceOcéan).
« Nous sommes dans une vraie phase d’industrialisation de notre activité matelotage », assure Thibault Reinhart. La société, qui s’appuie sur un bureau recherche et développement, touche désormais des domaines industriels aussi variés que l’offshore, le BTP, la domotique, la robotique, sans oublier le maritime. (avec ouest-france.fr)

Et c’est une Suédoise qui est aux petits plats pour ces marins!

Armel Le Cléac’h au ravitaillement chez Ariane Pehrson. Photo:DR

27 des 29 skippers (un record! plus important fournisseur!!) qui ont pris le départ du Vendée Globe ont fait confiance aux petits plats lyophilisés sélectionnés par Ariane Pehrson, suédoise vivant à Lorient.
Il y a un peu plus de 6 ans maintenant, Ariane Pehrson créait son entreprise, Lyophilise & Co, avec comme objectif d’améliorer l’avitaillement des marins. Un pari réussi, consacré par cette édition 2016-2017 du Vendée Globe.
Implantée au coeur du Pôle Course au Large à Lorient (tout près de celui du Finistère), cette femme de marin connaissait bien la problématique des skippers au moment de préparer une course : se rapprocher d’un fabricant dont la gamme restreinte par nature, ne leur assurait pas un grand choix…!
Partant de ce constat, Ariane Pehrson a changé les codes du marché en référençant près d’un millier de produits issus d’un cinquantaine de fournisseurs, en les stockant à Lorient, et en proposant de les commander par internet.
Le succès a immédiatement été au rendez-vous, puisqu’en 6 ans, son entreprise a créé 5 emplois, pour un chiffre d’affaires de 750 000 euros, en forte croissance, réalisé à 80% par internet.
Sur l’édition 2016-2017 du Vendée Globe, Lyophilisé & Co a fourni ainsi 27 des 29 bateaux s’alignant au départ. Comme le précise Ariane Pehrson, « les skippers se sont avitaillés pour 85 à 120 jours, en repas lyophilisés mais aussi en repas stérilisés, en snacks, en viande séchée, en soupes et en petits déjeuners (3000 à 6000 calories par jour, selon les endroits de navigation)… Les repas stérilisés représentant 50% des repas, pour varier les plaisirs, le budget alimentation des skippers allant de 2000 à 4000 euros ! Pour Le Cléac’h c’est simple, c’est un repas sur deux, il mange une fois lyophilisé, une fois stérilisé … » confie Ariane. Ça a semblé bien lui avoir réussi !
« Les courses au large sont toujours un gros levier de vente, en particulier la Volvo Ocean Race, mais aussi le Vendée Globe ! Je me suis installée ici au Pôle Course de Lorient il y a 10 ans au moment ou il n’y avait pas grand choix dans ce domaine de l’alimentation pour les nombreuses courses qui partaient dans le coin. C’était l’endroit idéal et j’ai construit patiemment mon réseau de fournisseurs et produits venus du monde entier, fiables et de qualité. Nous travaillons et conseillons régulièrement les navigateurs comme ceux du Vendée mais également les plaisanciers nombreux dans la région. Mais actuellement notre prochaine échéance c’est bien sûr la Volvo Ocean Race qui partira en octobre prochain… Ça sera la 3ème fois et en tant que suédoise j’ai peut-être un petit avantage. ..» sourit Ariane.
Initialement créée pour répondre aux besoins des marins, la société surfe désormais sur les loisirs outdoor, avec un succès qui ne se dément pas, puisqu’elle envisage d’atteindre le million d’euros de chiffre d’affaires d’ici 18 mois.

Des concurrents venus de dix pays et âgés de 23 à 66 ans, des bateaux mis à l’eau entre 1998 et 2015, des budgets allant de 1 à 10, des temps de parcours records… un Pôle course au large devenu un centre d’excellence de la voile française, une alimentation de chefs, des moyens de communication décidément hypersophistiqué sur les réseaux sociaux… Le Vendée Globe surnommé l’Everest de la mer est la course des extrêmes. Cette année le Finistérien Armel le Cléac’h le remporte pour sa 3ème participation et il a fait gagner pas mal de monde avec lui, originaire comme lui de ce département le plus maritime de France et qui met tout en oeuvre pour développer sa filière nautique (lire ici le premier volet de notre reportage).

Crédits Photos: DR, ouest-france, actu-nautic, Incidences Sails, Ino-Rope, Lyophilisé&Co, Rivacom, cg29, Volvo Ocean Race copyright