Le Festival des Jardins de la Côte d’Azur a donc livré son premier palmarès. Le Prix du Jury officiel est allé au Collectif les Olivettes, pour sa création « Jardins secrets » installée au sein des Jardins Biovès, à Menton (Alpes-Maritimes), réputée précisément pour bénéficier d’un climat subtropical, être la capitale des jardins et les fêter tous les mois d’avril.
« C’est un jardin pas comme les autres, c’est une mer qui rappelle la Méditerranée, celle sans qui aucun des jardins de la Côte d’Azur n’auraient pu voir le jour » a apprécié le jury. Le visiteur- voyageur est invité à monter sur la passerelle, au-dessus de la mer pour s’aventurer dans des grottes, cinq huttes conçues à la main en canne de Provence, végétal local millénaire.
Pour l’emporter, l’équipe a dessiné en plein cœur de ville un jardin éphémère constitué « d’îlots flottants qui invitent le voyageur à un tête-à-tête avec une ambiance, une plante ou une couleur. Dans des cabanes tissées, les sens sont en éveil. On peut s’asseoir, sentir et ressentir les odeurs propres à la Côte d’Azur : sauge, romarin, oranger (…) Chaque cabane offre une pose méditative » expliquent les concepteurs. De fait, entre les huttes et la passerelle qui les relie en chevauchant un parterre en friche, lequel bourgeonnera au fil des semaines, on se prend au jeu ; partir à la découverte de mondes distincts qui révèlent, pêle-mêle, des feuillages exubérants, de la terre de pluie, des arômes entêtants, des plantes douces et même des végétaux préhistoriques .
Le Prix de la Presse est allé au « Banquet » conçu par deux jeunes paysagistes du Sud-ouest Nicolas Besse et Pauline Gillet dans les Jardins de la Villa Rothschild à Cannes. « Au creux d’un banquet pousse un jardin opulent qui déborde sur la longue table nappée de blanc, les feuilles viennent caresser la nappe. Des plantules poussent dans les assiettes, des graines se sont ressemées dans les verres ! Les chaises sont installées, les convives vont se mettent à table, ils viennent fêter le printemps. Ils s’assoient à « hauteur de jardin ». Une palette de motifs et matières s’offrent à leurs regards. Chacun pourra compléter les menus avec ses propres recettes, ses connaissances, ses petites histoires… » racontent les deux jeunes créateurs tout heureux de leur distinction pour l’une de leurs premières réalisations.
Le Prix des Professionnels « Jardiniers et Paysagistes » est revenu à « Mounta Cala », jardin installé dans le prolongement de la Promenade du Paillon, face à la mer à Nice. « Le jardin a deux sources d’inspiration. La première est la mer, élément primordial de notre région. Et la seconde se situe au port de Nice, les Pointus, ces bateaux de pêche traditionnel de la région« .
Pour notre part deux autres jardins ont retenu notre attention:
– Le « Jardin de la Dansité » réalisé par l’atelier « Mouvements & Paysages » dans le Jardin de la Villa Fragonard à Grasse. «Ce parcours veut concilier le corps et l’âme, le ciel et la terre, l’éphémère et le durable. La danse puise dans son moyen d’expression abouti, une issue amenant à cette harmonie entre l’homme et son lieu de vie que Camus définissait comme « l’accord de la terre et du pied » explique Jean-Laurent Felizia, le paysagiste/naturaliste, maître d’oeuvre local. Et cette réalisation ressemble étrangement aux passerelles en bois, verre/verte et acier au design scandinave qui s’avancent dans la mer, dignes des éco-quartiers des villes nordiques.
– Et le Jardin « Bulles encensées » créé par le « Collectif Les Jardiniers Nomades » sur la Pinède Gould à Antibes-Juan-Les-Pins. « Le jardin proposé invite à l’évasion par les sens. Il est une expérience corporelle pure primitive, une immersion dans un paysage des richesses sensorielles méditerranéennes. Ce jardin est une réinterprétation moderne de la Côte d’Azur et de ses paysages … » Les 10 jardins éphémères en concours pour le Festival évoquent d’ailleurs tous, chacun à leur manière, la Méditerranée, ses plantes, ses arbres, ses parfums, ses couleurs et son art de vivre…
« Le jardin Méditerranéen est le témoin d’une alliance entre ciel et terre. L’homme né de cette alliance en est le trait d’union. Son histoire s’inscrit sur les bords d’une mer qui a donné naissance aux plus grandes civilisations… » souligne Jean Mus, l’architecte paysagiste et président du comité de sélection. Aujourd’hui, les jardins de la Côte d’Azur restent les gardiens de cette tradition, ils sont la vitrine des Jardins méditerranéens… ».
« La Côte d’Azur (départements des Alpes maritimes et du Var) reste le premier territoire français pour les surfaces des fleurs et feuillages (près de 50% de la surface nationale) loin devant la Loire Atlantique (9,3%), les Pyrénées orientales, la Seine et Marne et le Finistère. C’est ainsi que la Côte d’Azur offre aujourd’hui la visite de 80 jardins (hors parcs urbains) exceptionnels par leur botanique et leur histoire » éditorialise David Lisnard, Maire de Cannes et président du Comité Régional Tourisme Côte d’Azur. Et le Festival, transformé en Biennale (tous les 2 ans), devra être l’événement qui les mettra en valeur…
Parmi ces « Jardins Extraordinaires » trois d’entre eux ont attiré ce mois-ci, notre certain regard et sont le cadre de nombreuses animations:
Les Jardins du Musée International de la Parfumerie (MIP), situés dans la campagne du pays de Grasse, au pied des collines d’oliviers et de cyprès, qui invitent à une délicieuse promenade parfumée. Vous y découvrirez des végétaux, sources de matières premières pour la parfumerie et des plantes à senteur qui, aujourd’hui encore, inspirent les plus grands parfumeurs. Galimard, Fragonard, Molinard…Regroupés selon leurs familles olfactives, les plantes évoluent harmonieusement dans un espace où se mêlent les parfums les plus discrets et les plus exubérants. Vous pouvez vous approcher pour les toucher et les sentir, tous vos sens seront en éveil … Après le parcours olfactif, la visite vous entraîne à travers champs dans un décor de campagne authentique. Le respect des techniques d’agriculture et de jardinage éco-responsables y favorisent la biodiversité et la préservation de la faune et de la flore locales. Un moment bucolique à partager en famille ou seul, tout en profitant du confort des pergolas ombragées, des fontaines d’eau potable, des espaces de détente et de farniente !
Pour sa dixième année, ce musée-jardin, labellisé « musée de France » fait découvrir la culture des fleurs à parfum à travers de nombreux événements, dès ce mois-ci… Le 17 mai ouvrira une grande exposition: CHRISTIAN DIOR – Esprit de parfums au MUSÉE INTERNATIONAL DE LA PARFUMERIE à GRASSE. Jusqu’au 1er octobre.
Infos pratiques :Les Jardins du MIP
979, chemin des Gourettes
06370 Mouans-Sartoux
Tél. : 04 92 98 92 69
Les jardins sont ouverts tous les jours, du 1er avril au 30 novembre, y compris les jours fériés, à partir de 10h00 et jusqu’à 17h30 en avril-septembre-octobre-novembre ou 19h00 en mai-juin-juillet-août.
Le Jardin botanique de la Villa Thuret situé au cap d’Antibes. Le jardin est labellisé « remarquable » par le ministère de la Culture et fantastique avec ces arbres centenaires, souvent rares, « fantômes blancs ou rouges » qui a fait dire à Georges Sand que « c’était le plus beau jardin qu’elle ait vu dans sa vie ! » . Quand le botaniste Gustave Thuret achète en 1857 un terrain de 5 hectares au cap d’Antibes, c’est pour y planter des espèces exotiques, des collections d’arbres et arbustes exotiques, des serres, une pépinière et une équipe de botanistes. Aujourd’hui 1 600 d’entre elles sont toujours conservées. Le dessin classique du XIXe siècle a laissé place à un arboretum en pleine terre, vaste collection d’arbres et d’arbustes remarquables. Eucalyptus, palmiers ou conifères exotiques atteignent des sommets. Comme la plupart des jardins botaniques du monde, le jardin Thuret combine une fonction scientifique – liée à l’étude et à la conservation de la biodiversité végétale, avec l’INRA (Institut national de recherche agricole) – et une fonction pédagogique. Pour l’occasion, la Villa accueille une exposition de créations artistiques éphémères… Dans le cadre du Festival, des élèves d’une classe de BTS du lycée Vert-d’Azur d’Antibes ont investi l’espace et invitent à une lecture plus sensible de l’univers scientifique du jardin.
Jardin botanique de la Villa Thuret
Adresse : 90, chemin Raymond, Antibes.
Tél. : 04.97.21.25.00.
La Serre de la Madone à Menton
Nous voici revenu à Menton, capitale des jardins. Dans les Alpes-Maritimes, onze jardins sont labellisés « jardins remarquables ». Un label crée en 2004 par le ministère de la Culture… A Menton, le « Jardin Serre de la Madone » bénéficie de ce label. Un jardin anglais en retrait de la mer, à l’écart du tapage de la Côte d’Azur où son créateur, le Major Lawrence Johnston hante toujours les lieux.
La Serre de la Madone est un jardin d’agrément situé sur les hauteurs de Menton. Il se compose d’un riche panorama de plantes méditerranéennes et comprend 6.000 sortes de plantes. Lawrence Johnston, né citoyen américain à Paris en 1871, devenu citoyen britannique, est étudiant d’histoire à Cambridge. Dans les années 20, il achète deux terrains sur les hauteurs de Menton avec vue dégagée sur la vallée et en 1931, il entreprend de grands voyages en Afrique du Sud, en Chine et en Amérique avec des botanistes pour acquérir des plantes rares.
Le domaine fera 63 337 m2 réparti entre l’altitude de 51 mètres et 150 mètres sur la route des Serres de la Madone. Il transforme un domaine planté de citronniers et d’oliviers en jardin d’agrément. Le jardin est organisé sur des terrasses après avoir consolidé « les restanques ». Une villa construite à l’altitude de 80 mètres sépare l’espace agricole de l’espace forestier. Pour alimenter son jardin, il a réalisé ou modernisé douze citernes lui permettant d’avoir une réserve de 1 000 m3 d’eau.
Johnston quitte la France en 1940 et doit regagner l’Angleterre. La propriété fut pillée pendant l’Occupation. Il n’y revint qu’en 1949, mais avait déjà des problèmes de santé. En 1952, un éboulement de 200 mètres dû à des pluies incessantes endommage le jardin. Lawrence Johnston meurt dans son domaine le 27 avril 1958. Le parc est vaguement entretenu entre des ventes successives puis laissé à l’abandon. Ce n’est qu’en 1990 qu’il est classé au titre des Monuments historiques pour essayer de stopper la dégradation, et acheté en 1999 par le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. Un travail de réhabilitation du site peut alors commencer….
Sur la « French Riviera », avril est un mois de rêve, entre soleil et senteurs revenues. Les jardins constituent cette singularité de la Côte d’Azur. Pour mettre en valeur ce formidable patrimoine naturel, le département des Alpes-Maritimes lui a offert un tout nouveau Festival IN et OFF. De Cannes, la référence en matière de Festival à Menton, la cité des jardins, de Nice, la capitale des fleurs célébrées en février par le Carnaval, au pays de Grasse qui vient de déposer un dossier de candidature à l’Unesco pour ses « savoir-faire liés au parfum» et ses champs de fleurs à parfum qui reconquièrent petit à petit leur territoire… Un Festival dont le succès de cette première édition en fera une véritable référence de la créativité dans le monde des jardins méditerranéens ainsi qu’un indispensable regain pour l’attractivité d’une destination, blessée dans sa chair, il y a moins d’un an, par l’attentat de Nice et ses conséquences humaines et touristiques.
Deux jardins éphémères en compétition ont semble-t-il revêtu un caractère durable tant par leur réalisation « nordique » que par leur esprit « éco-responsable ». Il s’agit du jardin de la « Dansité » (voir plus haut) et celui de la « Sixième Extinction ». Nous les aborderons plus en détail sur lasuededurable.com
Au cours de ces différentes promenades vous pourrez goûter la Cuisine des Fleurs d’Yves Terrillon, créateur et distributeur de produits uniques d’épicerie fine à Antibes www.la-cuisine-des-fleurs.com ou bien encore celle des traiteurs Danièle et Philippe Giordano à Menton www.signature-traiteur.com
Credit photo CRT Côte d’Azur www.cotedazur-tourisme.com , Camille Moirenc et les différents sites.