« Vaux le Vicomte est l’œuvre fondatrice du jardin à la française. Majesté théâtrale, perfection formelle des tracés et maîtrise de la perspective caractérisent cette création qu’on retrouvera plus tard déclinée dans toutes les cours d’Europe » dit encore aujourd’hui Alain Baraton, le jardinier en chef du château de Versailles.

En 1652, pendant le règne de Louis XIV, quand André Le Nôtre qui deviendra plus tard le jardinier du roi et de Versailles, se mit au travail, la tâche était immense. Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV, venait d’acquérir à Maincy, à une heure à l’est de Paris, un domaine de 500 hectares, dont 33 dévolus aux jardins qui allaient entourer le château. Ils devaient démontrer la puissance de cet homme politique, parmi les plus influents du royaume. Les jardins, qui n’étaient jusque là que friches et herbes folles, seraient donc avant tout un symbole.
« Les jardins situés au Sud du château sont remarquables par leurs dimensions et leur style. Les arbres taillés, les bassins, les statues et les allées bien ordonnées en font un jardin à la française. De la terrasse du château on a l’agréable impression que tout le parc peut être vu d’un coup d’œil. Pour les dessiner, son concepteur, le jardinier paysagiste André Le Nôtre, utilise les effets d’optique et les lois de la perspective » explique Patrick Borgeot, le jardinier en chef de Vaux depuis 2007.
Le jardin se compose de trois parties : la première comprend une cour et une avant-cour ; la deuxième part du château et s’arrête aux petits canaux ; enfin, la troisième partie est constituée de ce qui est situé au-delà des petits canaux.
Le jardin est marqué par ce qu’on appelle « une perspective ralentie » : plus les éléments du jardin sont éloignés du château, plus ils sont longs ou hauts. Ainsi, le parterre de « broderies » est trois fois plus petit que le parterre de gazon situé au bout du jardin. De même, le bassin carré est huit fois plus grand que le Rond d’Eau. Les sculptures proches du château sont trois fois moins hautes que les termes des grottes.Ce procédé permet d’« écraser la perspective », de rendre le jardin plus petit qu’il n’est en réalité, est utilisé en France dès les années 1630, mais Le Nôtre l’amplifie.
La clôture permet de bien voir non seulement le château, mais aussi, le salon ovale n’étant fermé que de grilles, la perspective « traversante » qui mène au fond du jardin (1 800 mètres).
Vaux-Le Vicomte : Le modèle du jardin à la française signé André Le Nôtre
Le Nôtre qui avait étudié la perspective et le dessin était un homme de rigueur. Il consacra deux années à planifier ce chantier titanesque. En 1654, il fit dériver les eaux souterraines d’une rivière toute proche afin d’alimenter les fontaines du parc, ce qui nécessita le travail de 300 hommes pendant près d’un an. « Un réseau hydraulique que nous utilisons toujours aujourd’hui » souligne Patrick Borgeot.
Il conçut ensuite le parterre central et les grandes allées en terrasse à l’est et à l’ouest, également ornés de bassins. A partir de 1656, il réalisa les cascades et commença à creuser l’immense canal qui traverse le parc d’ouest en est. Ce n’est que 3 ans plus tard que les travaux aboutirent et que Le Nôtre s’attaqua à la partie sud.
Il agrémente les allées de charmilles et de végétaux à feuilles persistantes comme le buis et l’if sur lesquels ni le temps ni les saisons n’ont de prise.
Il traça des chemins, qu’on peut prendre en voiture électrique, conduisant tous à une gigantesque statue d’Hercule. « La statue d’Hercule est distante des grilles de l’entrée d’un km et demi. Mais grâce au jeu de perspectives implacablement bien maîtrise par le Nôtre, on a le sentiment qu’elle est bien plus proche » relève Patrick Borgeot.
Dans chacune des parcelles du jardin, Le Nôtre grossit les proportions pour « écraser la perspective », donner l’impression que le parc était plus petit qu’en réalité, offrant l’agréable sensation que l’ensemble pouvait être embrassé d’un seul coup d’œil.
« Ainsi les bassins du fond du jardin sont ils huit fois plus gros que ceux qui se trouvent au pied du château. Même illusion d’optique avec les parterres : les pelouses bordées de buis situées juste devant le bâtiment sont en fait trois fois plus petites que celles qui ornent le fond du jardin. Ce n’est qu’en avançant que le visiteur découvre le subterfuge » poursuit Patrick Borgeot.
Comme le firent avant lui les artisans de la grande restauration opérée au 19è siècle quand le château était à l’abandon, le jardinier en chef se réfère, pour respecter l’esprit du concepteur des lieux, aux croquis d’époque… Car Le Nôtre, lui, n’a laissé aucun écrit et peu de plans. « Sans doute n’imaginait-il pas que ses allées seraient un jour considérées comme des chefs d’œuvre » note Alexandre de Vogüé, l’un des propriétaires actuels du Domaine.
Aujourd’hui l’ultime reconnaissance que nous espérons est celle de son inscription au patrimoine mondial de l’Unesco » avoue-t-il
Roi des jardiniers et jardinier du Roi, Le Nôtre donna ses lettres de noblesse au jardin à la française. Il fut l’auteur des plus beaux jardins du XVIIe siècle. Ses talents lui valurent une fortune colossale et une réputation internationale. Si Versailles fut son chef d’oeuvre, Chantilly sa création préférée, Les Tuileries, Fontainebleau, Vincennes, Sceaux, Meudon, Saint-Cloud… le château de La Buissière (près de Gien, dans le Loiret), ses réalisations les plus célèbres, « le parc de Vaux-le-Vicomte demeure l’archétype du jardin à la française. Le modèle absolu… Jamais avant cette oeuvre, l’homme n’était parvenu à une telle maîtrise de la nature… L’endroit incarne une perfection qui inspira plus tard les dédales de verdure de Versailles » insiste Patrick Borgeot… Et celles de nombreux autres châteaux en France, nous l’avons vu mais également à l’étranger: Venaria Reale en Italie, Charlottenbourg et Kassel en Allemagne, Windsor en Angleterre, Fredriksborg à Copenhague et bien sûr Drottningholm à Stockholm , la résidence officielle du couple royal suédois qui est la réplique exacte des jardins de Vaux-le-Vicomte (avec Géo 09/2015)
Actualités 2017
Spectacle. Vaux le Vicomte aux chandelles
Les soirées aux chandelles sont de retour au château de Vaux le Vicomte tous les samedis soirs jusqu’au 7 octobre.
Les jeux de Jean de La Fontaine au château de Vaux-le-Vicomte
Vaux-le-Vicomte décide cette année de rendre hommage au célèbre fabuliste dont la vie est intimement liée à l’histoire de Vaux, en lançant toute une série d’activités nouvelles, en lien avec ses Fables, et ce jusqu’au 5 novembre 2017 (Renseignements sur www.vaux-le-vicomte.com )
Crédits Photo: DR et www.vaux-le-vicomte.com