#Théâtre: Bonne année 2022 ! Spectaculaire Année Molière ! #1

Le Théâtre français s’apprête à frapper les 3 coups de l’Année Molière ! Le 15 janvier 2022 sera célébré le 400e anniversaire de la naissance de l’auteur français le plus joué en France et à l’étranger et le monde du théâtre veut le célébrer en grande pompe !  

Après deux ans de pandémie, entre confinement, annulation et reprise à jauge réduite, avec présentation de pass-sanitaire et autres gestes-barrière, le monde du spectacle a particulièrement souffert avec une perte de recettes de plus de 70% … Du jour au lendemain, le rideau est tombé. le confinement a plongé dans le silence les lieux de spectacles et de culture et reporté sine-die festivals, spectacles et autres manifestations…. Un coup d’arrêt inédit qui a saisi dans la même stupeur tout un secteur aux réalités pourtant diverses, partageant souvent des équilibres économiques fragiles – mais aussi une contribution cruciale à la bonne santé économique du pays, au bien-être de ses habitants et à son unité.

La Comédie Française, le Théâtre Français, la Salle Richelieu, sa Maison (comme on peut dire que le Dramaten à Stockholm est la Maison de Bergman) dans les jardins du Ministère de la Culture à Paris, face au Musée du Louvre , le triangle vivant du patrimoine et de la culture française, veulent profiter de cette Année Molière, pour retrouver une ambiance digne des plus belles pièces de l’auteur du Bourgeois gentilhomme, des Précieuses ridicules, du Malade imaginaire, du Tartuffe et du Misanthrope. Des pièces à faire rire et réfléchir qui révèlent la vraie personnalité du dramaturge. Et qui continuent à se jouer avec succès tant leurs personnages nous ressemblent.

Jean-Baptiste Poquelin: Courte biographie
Fils du tapissier du roi, licencié en droit, Jean-Baptiste Poquelin renonce à reprendre l’affaire paternelle, et fonde l’Illustre-Théâtre. Sous le nom de Molière, et en compagnie de sa maîtresse, Madeleine Béjart, il vit treize années de pérégrinations en province, avant que la troupe ne décide de regagner Paris en 1658. C’est alors qu’il épouse Armande Béjart, qui lui donne un fils, Louis. Talentueux dramaturge, Molière écrit toutes sortes de pièces, de la farce à la comédie-ballet en collaboration avec Lully. Mais il excelle dans la mise en scène de comédies grinçantes et féroces, dans lesquelles il épingle les travers de la société. Molière utilise en effet le rire comme une arme avec laquelle il foudroie nombre de ses contemporains. Malgré son génie et la protection du roi, ‘Tartuffe’ et ‘Dom Juan’ sont interdites de représentation. S’il résiste aux cabales, sa santé défaillante a finalement raison de lui ; il meurt quasiment sur scène. Sept ans plus tard, la troupe de Molière, qui avait fusionné avec celles de l’Hôtel de Bourgogne et du Marais, donne naissance à la Comédie- Française.

Le français : La langue de Molière
Comment le français est ainsi devenu « la langue de Molière » ? Le dramaturge laisse en effet en héritage un français qui allie classicisme et vivacité.
Que notre langue soit surnommée «langue de Molière» est une reconnaissance du talent d’un auteur classique parmi les classiques, et agile dans le maniement de tous les registres. «C’est depuis le XIXe siècle qu’on dit langue de Molière. On a inventé une tradition ininterrompue de l’esprit français, depuis les Gaulois, en passant par Rabelais, jusqu’à lui. Et au XVIIIe s’impose cette idée, autour de La Fontaine, Boileau, Racine et Molière, d’une génération de classiques», explique Georges Forestier, professeur de lettres.
Molière: passeur d’une langue qui s’écarte des normes
Qu’a apporté ce génie de la comédie au français tel que nous le connaissons? «Qu’il touche un public très large, encore aujourd’hui, fait de Molière un passeur d’une langue qui est partie intégrante de notre patrimoine», estime Céline Paringaux, agrégée de lettres. «Mais s’il est une incarnation de la langue classique, en réalité la langue de ses pièces est extrêmement riche et s’écarte volontiers des normes en train de s’établir à son époque. On le voit dans Les Femmes savantes: le personnage qui porte le bon sens est Martine, celle qui écorche le français du grand grammairien Vaugelas, celle qui fait des fautes partout», ajoute-t-elle.
Réconcilier les différents niveaux de langue
Molière n’a pas eu son pareil pour s’adresser à tous les publics, populaire dans des tournées partout en France, de Carcassonne à Grenoble et à Rouen, ou royal à la cour de Versailles. Son français est compris et fait rire dans toutes les couches de la société. «Il réconcilie la langue des bateleurs avec celle des aristocrates et bourgeois», souligne Martial Poirson, qui publie le 21 janvier «Molière, la fabrique d’une gloire nationale» (Seuil).
Une gloire qui, de plus, va rayonner au-delà des frontières: «Molière a servi très tôt, et de son vivant, d’outil d’ambassade. Le français va se diffuser dans toutes les cours d’Europe, les Nordiques jusqu’à celle de Russie. Sur le continent, cette langue de Molière va se positionner comme celle des classes dominantes, vecteur d’une distinction sociale», affirme ce professeur de lettres.
L’effet comique, chez lui, provient aussi de la parodie de certaines manières de s’exprimer qui complexifient inutilement ou défigurent la langue: pédantisme et affèterie, charabia, archaïsmes, emprunts étrangers mal maîtrisés… Le français le plus clair, dès lors, y apparaît en majesté.
«Malgré les trois siècles et demi qui nous séparent de lui, il nous paraît contemporain. C’est un bricoleur de génie qui n’a jamais envisagé de devenir un classique. Il avait le talent pour épingler les snobs, les ambitieux, les hypocrites… Et nous en connaissons toujours!», selon Georges Forestier, biographe du plus célèbre des hommes de théâtre français. «Sa grande invention, c’est sa capacité à faire parler les personnages selon leur condition. Les gens du monde, les pédants à l’intérieur des gens du monde, le paysan, le médecin. Avec des mots, des tons, des accents différents».
Pour Martial Poirson, «Molière ignorait son génie: il était en train de l’inventer. Le caractère inoxydable de sa langue le distingue. Racine est complexe. Corneille peut paraître très vieillot. Molière reste vivace». Le français aurait pu aussi être «la langue de Voltaire», encore plus proche de la nôtre. Mais, ajoute ce dramaturge, «alors que Voltaire fut un très grand auteur de théâtre, il n’a pas cette postérité. On retient ses contes. Dans ses pièces à succès, son ironie mordante a quelque chose de dégradant, et on la supporte mal».
Chez Molière, d’après Céline Paringaux, «on trouve aussi bien du familier que du soutenu, de la prose que des vers, même de l’occitan et du picard dans Monsieur de Pourceaugnac. La palette est tellement large que les lecteurs et spectateurs de toutes les époques y ont trouvé leur bonheur». (avec AFP et Le Figaro)

L’Année Molière se terminera-t-elle par l’entrée de l’auteur au Panthéon ?

Le dramaturge français sera donc célébré en 2022 à travers des parutions, expositions, projections, podcast et divers événements à travers toute la France. La troupe de la Comédie Française devrait même monter ses 35 pièces.
Francis Huster, comédien « moliérien » par excellence, sociétaire de la Comédie Française, qui a joué plus de 4.000 représentations du répertoire de l’auteur, metteur en scène et écrivain, milite pour l’entrée de Molière au Panthéon (monument français dans le Quarier Latin à Paris, dédié aux grands personnages  de la République qui porte, notamment à son fronton, la célèbre inscription « Aux grands Hommes, la patrie reconnaissante. » ! Molière joue sans conteste sur cette scène. Huster vient de sortir, coup sur coup, Poquelin contre Molière (Armand Colin) et son Dictionnaire amoureux de Molière (Plon),

Et dès ce 15 janvier 2022, La Comédie Française ouvre l’Année Molière par une création du Belge Ivan van Hove, un des maîtres du théâtre contemporain, d’une version originelle et inédite du « Tartuffe »., la pièce culte, son personnage le plus emblématique.
Et Pézenas, dite « Cité de Molière » (pour les fréquents séjours de l’auteur dans le sud de la France près de Béziers), qui revendique la célèbre formule de Marcel Pagnol « Si Jean-Baptiste Poquelin est né à Paris, Molière est né à Pézenas ».se prépare à un grand week-end du 14 au  16 janvier 2022,i lançant officiellement les célébrations de « Pézenas 2022 » qui jalonneront toute cette année.
En vous souhaitant la plus belle des années, Francofil reviendra régulièrement sur l’Année Molière, en France et à l’étranger, emblématique de l’esprit français…

Crédits photos: DR, Comédie Française, AFP