La Suède est fantastique et généreuse ! Chaque année, la première semaine d’octobre, dite Semaine Nobel, la remet au centre de l’actualité. En désignant ses lauréats pour les prix de médecine, physique, chimie, littérature, paix, économie, elle nous rappelle ou nous fait connaître de nouveaux noms, de nouvelles matières, de nouveaux champs de recherche et d’activités… Chaque prix étant doté de 10 millions de couronnes suédoises (environ 920.000 euros)!
Cette année le jury suédois Nobel nous a fait découvrir, mieux que le dictionnaire français Larousse, de nouveaux noms, de nouvelles attitudes et de nouveaux mots de la langue française !.
En médecine: la paléogénomique !
Le prix Nobel de Médecine a couronné le fondateur de la paléogénomique, le Suédois Svante Pääbo. « En révélant les différences génétiques qui distinguent tous les humains vivants des homininés disparus, ses découvertes ont donné la base à l’exploration de ce qui fait de nous, humains, des êtres aussi uniques« , a salué le jury Nobel. Grâce à la paléogénomique, « nous avons maintenant une certaine capacité à remonter dans le temps et à suivre réellement l’histoire génétique et les changements génétiques », a commenté le chercheur lors d’une conférence de presse à Leipzig. Installé en Allemagne où il travaille au prestigieux Institut Max-Planck, Svante Pääbo a comparé lundi ses recherches à des « fouilles archéologiques dans le génome humain« . Ses travaux ont récemment montré que les malades du Covid-19 portant un segment d’ADN de Néandertal – notamment en Europe, et plus notablement en Asie du Sud – hérité d’un croisement avec le génome humain il y a quelque 60.000 ans, ont plus de risques d’avoir des complications sévères de la maladie.
En physique: l’intrication quantique !
En mécanique quantique, l’intrication quantique, ou enchevêtrement quantique, est un phénomène dans lequel deux particules forment un système lié, et présentent des états quantiques dépendant l’un de l’autre quelle que soit la distance qui les sépare.
Le prix Nobel de physique a couronné les inventeurs de l’intrication quantique: le Français Alain Aspect, l’Américain John Clauser et l’Autrichien Anton Zeilinger, trois pionniers des mécanismes révolutionnaires de la physique quantique. Le trio de septuagénaires est récompensé pour ses découvertes sur « l’intrication quantique », la 2ème révolution de la physique quantique, un phénomène où deux particules quantiques sont parfaitement corrélées, quelle que soit la distance qui les sépare, a annoncé le jury Nobel.
Malgré le nom de « téléportation quantique » utilisé pour le mécanisme de l’intrication, « ce n’est pas comme dans Star Trek » avec des téléportations d’objets ou a fortiori de personnes… En revanche, avec l’intrication, « on peut transférer l’information sans même connaître l’information », ont souligné les scientifiques.
La mécanique quantique est une science contre-intuitive qui décrit le monde à l’échelle de l’infiniment petit, où les choses peuvent simultanément exister, ne pas exister et être quelque part entre les deux. La première révolution quantique nous a donné les transistors, les semi-conducteurs, les ordinateurs et les lasers », explique à l’AFP Mohamed Bourennane, professeur d’informatique quantique à l’Université de Stockholm. « Mais la deuxième, fondée sur la superposition et l’intrication, va nous permettre à l’avenir d’avoir des ordinateurs quantiques, ou des inscriptions quantiques utiles pour l’imagerie ou les capteurs ».
En chimie: la chimie « click »!
Le prix Nobel de chimie 2022 a été attribué conjointement à l’Américaine Carolyn R. Bertozzi, à son compatriote K. Barry Sharpless et au Danois Morten Meldal, pour le développement de la chimie « click » et de la chimie bioorthogonale, a annoncé l’Académie royale suédoise des Sciences.
K. Barry Sharpless et Morten Meldal ont « posé les bases d’une nouvelle forme fonctionnelle de chimie – la chimie « click », qui permet de réaliser des assemblages moléculaires rapidement et efficacement (en « clippant » des molécules entre elles comme on assemble des boutons-pressions), explique l’académie dans son communiqué.
En littérature: Le récit clinique, l’écriture comme un couteau!
Le prix Nobel de littérature 2022 couronne l’écrivaine française Annie Ernaux pour l’ensemble de sa carrière et son traitement de « la mémoire », a annoncé l’Académie suédoise. L’écrivaine de 82 ans est récompensée pour « le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle », a expliqué le jury Nobel. Elle devient la 17e femme à décrocher le Nobel de littérature, et le 16e lauréat français depuis la fondation des célèbres récompenses en 1901 mais la première autrice française: ni Colette, ni Simone De Beauvoir, Duras, ni Yourcenar , ni Nathalie Sarraute n’ont eu cet honneur…
Cette professeure de littérature à l’université de Cergy-Pontoise a écrit une vingtaine de récits ces cinquante dernières années, dans lesquels elle dissèque le poids de la domination de classes et la passion amoureuse, deux thèmes ayant marqué son itinéraire de femme déchirée par ses origines populaires.
En liberté: Le Prix Nobel de la Paix 2022 honore la résistance à Poutine!
Le prix Nobel de la paix 2002 a été décerné à l’opposant bélarusse Ales Bialiatski, emprisonné depuis juillet 2021, l’ONG russe Memorial et le Centre ukrainien pour les libértés civiles (CLC). «Ils représentent la société civile dans leurs pays, le droit de critiquer le pouvoir, les droits des citoyens, la lutte contre les crimes de guerre, les abus de pouvoir», a justifié l’académie Nobel, pour qui ces trois lauréats incarnent encore «la paix et démocratie».
En récompensant ces trois acteurs de trois pays impliqués dans le conflit ukrainien, l’académie Nobel a voulu envoyer un signal fort en cette année marquée par le déclenchement de l’invasion russe en Ukraine.
En économie: le faux Nobel pour les vraies crises financières !
Le « prix Nobel de l’Économie 2022 » a été décerné à trois Américains pour leurs travaux sur les banques et les crises financière : l’ancien président de la Fed (la Réserve fédérale américaine, banque centrale des États-Unis) Ben S. Bernanke et ses compatriotes Douglas W. Diamond et Philip H. Dybvig. « Le trio a significativement amélioré notre compréhension du rôle des banques dans notre économie, particulièrement durant les crises financières, ainsi que la façon de réguler les marchés financiers« , a annoncé le jury Nobel. Une importante découverte de leurs recherches, dont les travaux commencent à partir des années 1980, a été de montrer pourquoi éviter l’effondrement des banques est vital, a ajouté le comité.
Parfois qualifié de « faux Nobel » car il n’a pas été prévu par le testament d’Alfred Nobel, le prix de sciences économiques a été créé par la Banque centrale suédoise à la mémoire du célèbre inventeur. C’est le dernier prix à être remis pour cette saison. Leur remise aura lieu, comme chaque année, le 10 décembre, jour de la mort d’Alfred Nobel en 1901, lors de cérémonies à Stockholm et à Oslo.
Crédits photo: DR et Fondation Nobel