Tout le monde se souvient probablement de la cérémonie du prix Nobel de la Paix de l’an dernier ; le comité Nobel avait décerné, de manière plutôt surprenante son fameux prix au président américain Barack Obama. Cette décision ne manqua pas d’attirer de nombreux commentaires critiques concernant le manque d’actes concrets de la part du président US. La cuvée 2010 de ce qui est peut être la plus médiatisée des distinctions politiques a soulevé encore plus de vagues mais pour de toutes autres raisons.
Il est néanmoins bien peu probable qu’en choisissant Liu Xaobo, le désormais iconique dissident chinois, le comité Nobel n’ait pas eu conscience des retombées de leur décision. En décernant le prix à un activiste que Pékin considère comme un simple criminel de droit commun, c’est tout un maelström diplomatique qui s’est en effet déchaîné à l’encontre de la Norvège.
Comme il est maintenant commun lorsqu’une puissance occidentale se met à critiquer la politique répressive chinoise en matière des droits de l’homme, c’est tout l’appareil politique du parti communiste chinois qui se mit à hausser la voix et exprimer son désaccord. Comme à l’accoutumé, le discours bien rodé des diplomates dénonça une tentative de subversion inacceptable et rappela jusqu’à plus soif le statut de “criminel” du lauréat. Liu Xaobo fut en effet convaincu en décembre 2009 d’avoir incité à la subversion du pouvoir central socialiste à travers notamment de la Charte 08, un manifeste appelant à la libéralisation politique et économique de l’Empire du milieu.
Servant sa sentence de onze années dans une prison du nord-est du pays, Liu fut incapable de prendre part à la cérémonie. Le gouvernement plaça également en détention ou en surveillance rapprochée divers membres de sa famille et collaborateurs et le fit si bien qu’aucun représentant ne put se déplacer jusqu’à Oslo afin de recevoir le prix en son nom. Une telle situation ne s’était pas présentée depuis que le comité offrit le Prix Nobel de la Paix à Carl von Ossietzky en 1935, alors emprisonné dans les geôles nazies pour ses activités pacifistes.
Au premier rang des critiques, l’ambassadeur chinois à Oslo, Tang Guoqiang, passa plusieurs semaines à tenter de faire pression sur les autres ambassadeurs présents dans la capitale norvégienne et les dissuader de participer à la remise du prix. Au total, 45 ambassadeurs se seront déplacés et 18 auront refusés. On peut principalement trouver dans cette liste des pays peu renommés pour leur libéralisme politique (Kazakhstan, Vietnam, Sri Lanka), de fiers représentants de « l’axe du mal» (Cuba, Venezuela) et des pays du proche et moyen orient (Iran, Iraq, Afghanistan, Arabie Saoudite Soudan, Pakistan Egypte) et du Maghreb (Tunisie, Algérie et Maroc). La Russie, sans trop de surprise, n’aura pas participé a l’événement, étrangement imité en cela par l’Argentine.
Malgré une atmosphère plus que délétère sur le plan diplomatique (« Considérant les présentes circonstances il est difficile de maintenir une relation avec la Norvège aussi bonne que par le passé » aurait également déclaré Tang), les célébrations de la remise du prix se seront passées sans aucun grabuge et auront été soutenues par d’innombrables événements populaires à travers le monde. Souvent organisés par des divisions locales d’Amnesty international et autres ONGs, on aura pu assister à des manifestations et autres happenings dans de nombreux pays et ce jusqu’à Hong Kong, la libre pensante. À Oslo même, plusieurs centaines d’enfants se sont rassemblés dans le centre ville pour exprimer leur soutien à Liu Xaobo tandis que la cérémonie battait son plein dans les murs de l’Hôtel de ville.
Lors de celle ci, le président du comité Nobel, Thorbjørn Jagland offrit un discours poignant en l’hommage du lauréat dont il regretta publiquement l’absence. À de nombreuses reprises lors du discours, les déclarations de Jagland attirèrent les vifs applaudissements du public dans lequel le roi et la reine figuraient au premier rang. À la fin du discours, le président du comité descendit de son pupitre et, dans un moment déjà devenu mémorable, il plaça le diplôme et la médaille d’or dans la chaise vide à sa gauche, là où Liu aurait dû se tenir.
Selon le protocole du prix Nobel, un discours par le lauréat aurait dû suivre. Pour d’évidentes raisons, un remplacement fut trouvé. L’actrice norvégienne Liv Ullmann lut à sa place un essai de Liu Xaobo intitulé « Je n’ai pas d’ennemis : ma dernière déclaration » datée du 23 décembre 2009, deux jours avant sa condamnation. La cérémonie se termina enfin par une série de chants traditionnels norvégiens exécutés par une chorale d’enfants de l’Opéra et Ballet national, un vœu du condamné qui voit dans les enfants le futur de l’humanité.
Par Lyonel Perabo
Est-ce possible que vous m’envoyiez les teextes intégrés des discours prononcés à Oslo lors de la remise du nobel de la paix le 11 décembre 2010?
Merci