Assange dans la course au Nobel

C’est officiel depuis le 2 février, Julian Assange, l’homme derrière Wkileaks a été dument ajouté à la liste des nominés pour le Prix Nobel de la paix 2011. Placé aux cotés de militants des droits de l’homme tels Svetlana Gannushkina (Russie) et Sima Samar (Afghanistan) au parcours plus traditionnels, Assange a t-il une chance de remporter la prestigieuse récompense ?

C’est le comité Nobel norvégien, qui, comme le veut l’usage, a procédé à la nomination des possibles lauréats. Ce comité, regroupant des élus norvégiens, des chercheurs et des individus ayant un rapport avec l’institut se réunira à nouveau vers la fin du mois afin de potentiellement ajouter quelques noms sur la liste.

Mais déjà, à la mention du nom d’Assange, certaines voix se sont élevées pour critiquer un tel choix. Scott London, journaliste américain et expert du Prix Nobel fit publiquement connaitre son désagrément : « dire que les actions d’Assange ont, de quelque manière que ce soit, promu la fraternité entre les nations, pour invoquer la fameuse ligne du testament d’Alfred Nobel serait tiré par les cheveux si ce n’est complètement hors propos ». En effet, dans la vision de Nobel lui-même, le prix devrait être attribué à ceux qui ont lutté pour « la fraternité entre les nations, pour l’abolition ou la réduction des forces armées et pour tenir et promouvoir les congrès pour la paix », Le comité norvégien du Prix Nobel de la paix a en revanche fait évoluer cette définition au fil des ans afin de récompenser les défenseurs des droits de l’homme, les environnementalistes et autres individus qui n’auraient pas rempli les anciens critères de sélection.

Pour donner un exemple concret, il suffit de jeter un rapide coup d’œil aux plus récents lauréats du prix :

– Liu Xaobo (2010) est simplement un défenseur des droits l’homme.
– Barack Obama (2009) reçut le prix avant d’avoir eu le temps de mettre en place une quelconque politique.
– Al Gore (2007) obtint son prix à travers son effort pour avoir disséminé un savoir important concernant le changement climatique.
– Muhammad Yunnus (2006) est le créateur de la micro-finance.

On se rend bien vite compte que le comité du Prix Nobel de la paix semble donc de plus en plus privilégier les défenseurs de droits de l’homme et autres activistes n’ayant pour ainsi dire rien à voir avec les Wilson, Dunant et Roosevelt du début du siècle dernier.

Sous ce nouvel éclairage, il n’est peut-être pas si intrigant de découvrir le nom d’Assange sur la liste des nominés. Snorre Valen, le député norvégien responsable de sa nomination défend ainsi son choix. D’après une entrée de son blog « L’an dernier Liu Xiaobo reçut le prix pour son combat pour les droits de l’homme, la démocratie et la liberté de parole en Chine. De même, Wikileaks a globalement contribué à la lutte pour ces valeurs en exposant (entre autres) la corruption, les crimes de guerre et la torture. »

Pris sous cet angle, Assange pourrait en théorie recevoir le prix mais les obstacles sur ce chemin sont nombreux. D’après Kristian Berg-Harpviken, le directeur de l’Institut de recherche irénologique d’Oslo ne pense pas que le comité portera son choix final sur Assange. « Il est trop controversé et le lancement de Wikileaks a soulevé de sérieuses questions sur la sécurité des données ainsi que la disponibilité d’informations potentiellement dangereuses ».

Si il est encore trop tôt pour faire trop de bruit sur cet affaire (rappelons que le prix ne sera décerné qu’en octobre), le simple fait qu’Assange finisse sur la liste des nominés est en soit le symbole d’une certaine reconnaissance du rôle de trouble-fête mondial dont a hérité le fondateur de Wikileaks. Si les responsables de sa nomination parviennent à monter un dossier conséquent et à plaider sa cause auprès des autres juges du Nobel, qui sait, peut être aurons nous cette année encore une nouvelle controverse venant tout droit du Royaume de Norvège.